Pierre Bergé s'attaque au Téléthon !
Le milliardaire Pierre Bergé a créé la polémique en s'offusquant des millions versés chaque année au Téléthon. Je ne sais pas si toutes ses accusations sont fondées, mais je trouve le débat intéressant car il pose le problème du financement de la recherche dans ce pays.
En filigrane, que dit Mr Bergé ? Tout simplement qu'avec l'apparition du Téléthon il y a plus de 20 ans, une grande partie de l'argent de la recherche est dirigée vers les myopathies, au détriment d'autres maladies, le SIDA notamment, mais aussi les maladies rares. Cela s'explique par l'importance des dons lors de l'émission télévisée annuelle et aussi parce que cette médiatisation encourage l'État à investir prioritairement sur ces domaines de recherche.
Ce que dit Mr Bergé sur le fond est somme toute assez juste, même s'il a la maladresse d'agrémenter ses propos de suspicions que personne ne peut vérifier. D'ailleurs la réaction outrée des associations et des organisateurs du Téléthon en dit long sur l'institutionnalisation de cet évènement. Sous prétexte que cet appel au don annuel serait l'incarnation même de la générosité, il devient impossible de le critiquer et de s'interroger sur la destination de l'argent ou sur le fonctionnement de la recherche.
Il est en effet une chose dont le mécène de Mme Royal ne parle pas. En France, la recherche médicale est financée essentiellement par l'État, par le biais de nos impôts. C'est à dire que nous payons déjà pour la recherche. L'organisation de séances massives de don, consiste donc à faire payer une seconde fois les citoyens avec leur assentiment (elle est aussi l'occasion pour de grandes entreprises de se faire de la publicité à peu de frais), et de dédouaner la force publique du désengagement constant qui est le sien depuis un certain nombre d'années dans le domaine de la recherche publique.
Ce désengagement des institutions publiques a un corrélat : la montée en puissance des entreprises privées dans le domaine de la recherche. Sachant que celles-ci se concentrent surtout sur des domaines rentables à terme, c'est à dire au détriment de maladies rares ou nécessitant un gros investissement. La montée en puissance d'associations comme l'AFM (Association Française contre les Myopathies), ou la Ligue contre le cancer ressort de la même logique, celle d'une marchandisationmarchandisation de la maladie et de la mise en concurrence des pathologies les une contre les unes.
L'appel aux dons n'est pas pour autant à bannir, puisqu'il est un excellent moyen pour sensibiliser les Français. Pour autant, il ne doit en aucun cas se substituer à une politique dans le domaine de la recherche médicale. L'Etat ne doit pas se désengager, et surtout il doit continuer à soutenir les malades atteints de maladies qui n'ont pas la chance de bénéficier de la même médiatisation.