Tristesse de l'homme de gauche !
J'aurais pu écrire un article vengeur sur le spectacle donné par les socialistes depuis des mois, avec l'apothéose que l'on sait. J'aurais pu me lâcher sur ces éléphants dont tout le monde souhaite le départ et qui ne veulent pas lâcher la place. J'aurais pu railler ceux qui sont ambitieux au point de ne pas accepter une défaite et de préférer leur égo à leur parti, à la défense des Français. Mais je n'irai pas plus loin. Le seul sentiment qui m'habite aujourd'hui est le dégoût.
Je ressens le désarroi de toutes ces hommes et ces femmes de gauche pour qui la politique menée par Sarkozy est insupportable. Je ressens cette peur créée par les dérives sécuritaires et ultra-libérales, par le mépris comme outil de gouvernement. Mais surtout, face à tous ces coups portés par la droite, je ressens le besoin d'avoir une alternative politique, un espoir, et celui-ci, faute de mieux ne peut être porté que par le Parti Socialiste.
Même s'ils n'ont pas souvent été à la hauteur, les socialistes ont longtemps été le réceptacle d'aspirations à un monde meilleur. Aspirations souvent déçues, mais au moins ils étaient là, on pouvait se reposer sur eux pour déverser notre colère à chaque élection.
Cette fois-ci, ils nous ont définitivement abandonnés. Devant une crise qui s'annonce exceptionnelle en matière de destruction d'emplois, de pauvreté et d'injustice, ils ont préféré leurs petites querelles intestines. Alors que l'on a besoin d'un discours fort pour soutenir les enseignants ou les postiers dans leurs luttes, on a juste des batailles de personnes.
L'homme de gauche que je suis ne se faisait aucune illusion, mais cette fois, je me sens trahi, abandonné, et seul face à mes doutes, mes peurs et mes angoisses sur un futur qui s'annonce terrible.
Ceux qui me lisent régulièrement savent que j'ai une attirance pour des petites lumières qui essaient de s'allumer à l'extrême-gauche de l'échiquier politique. Mais pour l'instant, peu importe ces lumières, et puis il encore trop tôt pour se raccrocher un autre espoir, la peur d'être encore déçu est forte. Non, la seule chose qui compte maintenant, c'est que j'ai décidé de tourner définitivement ma page d'électeur socialiste, même si je le faisais plus qu'occasionnellement, aux seconds tours. Je tourne le dos à la famille politique dans laquelle j'ai grandi, à cette image de mon père en pleurs le 10 mai 1981, à ces moments de lutte en 1995 aux côtés des militants socialistes. Je ne suis plus, je ne peux plus être socialiste. Et j'en suis infiniment triste.