Et après le 19 mars ?
D'ores et déjà, la question n'est plus de savoir si le 19 mars sera un succès ou pas. Le nombre de manifestants sera très important, il ne peut en être autrement tant le sentiment d'injustice est fort. Non, la vraie question qui se pose désormais est de savoir ce qui se passera ensuite, puisqu'il est aussi acté que le gouvernement ne changera pas sa politique.
Pour beaucoup, dont je suis, l'exemple à suivre est celui de la Guadeloupe : une grève générale massive jusqu'à obtention de satisfaction. L'histoire de notre pays regorge d'exemples où cette tactique a été payante. Mais en cette période de crise économique aigüe, où le chômage et la précarité rôdent pour beaucoup de Français, il est difficile de s'installer dans un conflit durable, pourtant souhaitable.
En outre, l'attitude de certains partenaires sociaux porte à caution. Certes, c'est l'unité syndicale, si rare dans notre pays, qui permet le succès des journées de manifestation et de grève. Mais cette unité est aussi la faiblesse du mouvement actuel, certaines centrales syndicales ne s'engageant que sur des mots d'ordres modérés, donnent l'impression d'agir en garants de la paix social et d'éviter toute explosion incontrôlée. En cela, ces leaders syndicaux sont complices du pouvoir.
Cependant, plus le temps passe, plus la colère devient immense et risque à terme d'être difficilement maîtrisable. Que ce soit les étudiants, les salariés de Continental ou de Sony, des manifestations de violence se font jour. De plus en plus il y a une incompréhension face à l'attitude des syndicats, et ceux-ci risquent d'être dépassés par la base. Comme ce fut le cas lors des manifestations anti-CPE.
Un tel dépassement est aujourd'hui possible et facilité par la faiblesse des principales organisations syndicales. Je crois effectivement que les prochains mois peuvent déboucher sur un mouvement d'ampleur. Mais attention, ce ne serait pas sans danger.
Le premier risque réside dans l'inconnu. L'histoire démontre que le pire est souvent ce qui arrive dans des périodes troublées. Un mouvement d'importance pourrait donc déboucher sur un durcissement du pouvoir. En outre, si les syndicats et les principaux partis politiques s'avéraient dépassés, cela serait grandement préjudiciable pour le futur, décrédibilisant durablement ces organisations, laissant ainsi le terrain libre à la droite et au patronat.
Au final, je suis partisan d'un mouvement d'ampleur, mais accompagné par les forces syndicales, au moins celles qui sont vraiment revendicatives, ce qui permettrait de renvoyer les autres à leur responsabilités. Je crois donc qu'après le 19 mars il faut que les salariés fassent pression sur les directions syndicales, même si cela doit aboutir à la fin de l'unité.