Allons-nous tous virer sarkozystes ?
A en croire les sondages et la plupart des commentateurs politiques (tous objectifs et indépendants, cela va de soi), les Français seraient d'accord en grade partie avec la politique menée, et apprécieraient l'attitude du nouveau président, qui obtiendrait selon certains instituts d'opinion des scores quasi soviétiques. Certes, Mr Sarkozy est habile, et je reconnais que son discours peut séduire une grande partie de la population prompte à soutenir une politique autoritariste. Pourtant, je suis loin d'être convaincu de la véracité de cette popularité, et je suis même enclin à penser qu'il y a une tentative de manipulation de l'opinion derrière tout cela.
Tout d'abord, et j'ai déjà eu l'occasion de le dire maintes fois, les sondages n'ont aucune fiabilité. Dans un de mes derniers messages, je démontrais comment à partir de la façon dont on pose la question, on peut obtenir la réponse souhaitée. En outre, il faut tenir compte du commanditaire. L'Humanité a publié il y a quelques temps une enquête montrant que les Français ont une bonne image des syndicats, tandis qu'un autre journal d'une sensibilité différente (j'ai oublié lequel) impute, sondage à l'appui, à ces mêmes syndicats nombre des dysfonctionnements de la fonction publique. Tout dépend donc de ce que le lecteur attend. Ensuite, toujours sur les sondages, il est bon de rappeler qu'ils ne font pas l'élection, sinon Barre,Balladur, Jospin et Bayrou auraient tous étaient présidents. Pourtant aucun d'entre eux n'a atteint le second tour, malgré une bonne cote d'opinion.
Le second point, relève de la partialité des médias dans le traitement de l'information. Chacun ne peut plus ignorer aujourd'hui les liens étroits qui unissent Nicolas Sarkozy à la plupart des grands organes de presse. Les émissions supprimées ou les articles censurés depuis 3 mois en attestent. Or, revenons un peu sur les sondages. En admettant que ces derniers puissent être impartiaux, quand on demande aux gens ce qu'ils pensent de tel projet de loi, la réponse ne peut être que satisfaisante pour le gouvernement, puisque l'immense majorité des personnes interrogées n'aura eu droit qu'à une information partiale, voire partisane, pour comprendre les enjeux et conséquences du projet de loi.
Le troisième point qui me fait penser que Mr Sarkozy n'ait peut-être pas aussi populaire que cela a rapport à son élection, et à la nature même de son adversaire principale : une femme. Rien ne pourra m'enlever de la tête qu'une réaction purement sexiste d'une part décisive de nos compatriotes a bien aidé le candidat de la droite. Les médias, en relayant plus que de raison les "bourdes" de Mme Royal et sa soi-disant incompétence, et en omettant de faire le même traitement à Mr Sarkozy, ont bien entendu facilité cela. Il n'est qu'à voir la structure même de l'électorat de Mr Sarkozy, plus âgé, plus rural, avec une proportion plus importante qu'à l'accoutumée d'ouvriers et d'employés pour un candidat de la droite, pour comprendre que la thématique de la femme président, si chére à Mme Royal, ne l'a pas servi, bien au contraire. Les discours autoritaires et la posture virile de Mr Sarkozy ont fait le reste. (Je tiens cependant à préciser que je n'ai rien contre les catégories sociales précitées, mais il est clair qu'une population urbaine, jeune, avec un bon niveau d'études est plus ouverte sur les questions sociales, et sur l'égalité des sexes, or, c'est exactement la structure de l'électorat de Mme Royal).
Enfin, pour terminer ma démonstration, qui pour certains peut sembler relever de la méthode Coué, je vais terminer par du concret. Depuis 3 mois, il y a eu un certain nombre d'élections cantonales partielles. Et dans la quasi totalité des cas, la gauche améliore nettement ses scores (le canton de Nice XI fait exception), par rapport aux cantonales précédentes, mais également par rapport à la présidentielle. La droite aussi dans une certaine mesure, mais c'est essentiellement du à la continuité de l'effondrement du Front National. Or, si nos sondeurs et nos analystes politiques avaient bien voulu analyser ces scrutins partiels avant 2002 et 2007, ils auraient compris que les résultats finaux y étaient déjà inscrits en filigrane. Les candidats du Front national avaient de plus augmenté leur score aux cantonales générales de 2001, malgré la scission avec Bruno Mégret. Il n'existe pas de hasard en politique.
Evidemment, je veux bien admettre qu'il y a une part d'empirisme dans mon exposé. Mais alors, il faut aussi admettre qu'il y a une grande tentative de manipulation de l'opinion autour du personnage de Mr Sarkozy.