Non à la TVA sociale ! (2)
Je pense qu'il est faux de considérer que les entreprises agissent par philantropie, et qu'elles ne répercutent pas les hausses de la TVA sur leurs prix. Si certaines pratiquent la modération, d'autres augmentent bel et bien leurs tarifs, et jusqu'ici, lorsque la TVA a monté, il n'y a en tout cas jamais eu de baisse (rappelez-vous 1995 et le gouvernement Juppé). En effet, cette hausse représentent pour les entrepreneurs un manque à gagner très important que ne compensera pas la baisse des charges sociales puisque celle-ci se traduira par une hausse des salaires due aux heures supplémentaires, or, ce manque, il n'y a que deux façons de le compenser, soit par la baisse ou la stagnation des salaires (hors heures supplémentaires), soit par la hausses des prix et tarifs payés par les consommateurs, c'est à dire tout le monde.
Je vais prendre quelques exemples, lorsque l'Etat a augmenté les taxes sur le tabac, les firmes du secteur ont tout de suite répercuté la hausse. Quand le taux de TVA sur la restauration rapide est passé de 5.5 % à 19.5 %, les prix n'ont certes pas bougé, mais c'est en maintenant le personnel dans des conditions de précarité extrême. On peut expliquer et démontrer de façon théorique que la TVA sociale peut fonctionner, et à terme, s'avérer une bonne solution, j'avoue même que sous certains aspects l'idée paraît séduisante sur le papier, mais le problème est que jusqu'ici la théorie n'a pas résisté à l'épreuve des faits.
Je vais prendre un autre exemple, celui de l'Allemagne, dont on parle beaucoup puisqu'elle a instauré elle aussi une TVA sociale, avec succés semble-t-il. Mais la situation allemande est très différente, car s'ils ont bien procédé à une augmentation, l'argent récolté est affecté à la diminution de la dette et non pas à une compensation de baisses de charges sociales. En outre, il faut rappeler que le taux allemand était beaucoup plus bas que le taux français (qui est un des plus élevé en Europe) et l'augmentation n'a été que de 3 % contre 5 % apparemment envisagés en France.
De plus, contrairement à l'hexagone, l'Allemagne est un pays fortement exportateur, avec un secteur de l'industrie encore très puissant, tandis que la France fabrique de moins en moins de produits manufacturés sur son sol et importe donc de plus en plus. Avec la TVA sociale, les produits exportés vont baisser et les produits importés augmenter. C'est ce que confirme Mr Xavier Timbaud, directeur du département analyse et prévision de l'OFCE, sur le site du Monde cet après-midi, puisque pour lui, avec la TVA sociale le consommateur "va payer plus cher les produits importés pour favoriser la compétitivité des entreprises". Il y aura donc bien une augmentation des prix, qui sera supportée plus durement par les classes sociales défavorisées. Sans compter que l'efficacité de la lutte contre la délocalisation n'est pas prouvée.
Enfin pour sortir des considérations purement économiques, j'aimerais parler un peu plus des idées et de la philosophie de l'action politique. En effet, je trouve que l'on parle beaucoup des entreprises, de chiffre d'affaires, de charges, mais pas assez des gens. Or, à preuve du contraire, ce sont bien les personnes physiques qui votent et pas encore les personnes morales. A quand une politique qui cessera d'être basée sur l'économie et qui remettra l'Homme au centre ? Quand va-t-on se poser la question du rôle du politique, n'est-il là que pour aider les entreprises ? Le but de la vie est-il de gagner toujours plus d'argent, ou de tous gagner suffisamment pour tous vivre correctement ? Faut-il encourager constamment une politique basée sur la consommation sachant toutes les conséquences que cela a sur l'environnement ?
C'est notre façon de penser le vivre-ensemble qu'il faut revoir, et pas seulement la TVA.