Avec la manif contre le mariage gay la droite a rendu un fier service à François Hollande.

On ne naît pas Président de la République, on le devient ! C'est une règle, certes non écrite, mais qui se vérifie pour chaque nouveau président. Pour la plupart d'entre eux, ils ont dû leur stature, leur incarnation du rôle présidentiel, à une grande mesure, ou une grande décision. Pour presque tous les présidents de la cinquième République, ont peut inscrire une loi ou un grand moment historique enface de leurs noms. Ainsi de Giscard d'Estaing avec la loi sur l'avortement, de François Mitterrand avec la peine de mort, ou de Jacques avec le refus d'engager la France dans la guerre d'Irak. Il en va un peu différemment pour Charles de Gaulle, puisqu'il était le seul à avoir la stature de Président avant d'être éélu. il n'empeche, la sortie de la France de l'OTAN est une décision historique à mettre à son crédit. Le point commun de chacun de ces moments clés est qu'ils n'allaient pas forcément de soi. Chacune de ces décisions est le fruit du courage politique. Vous aurez noté que j'ai omis volontairement deux présidents de la République : Georges Pompidou, parce que son action s'inscrit comme la continuité du gaullisme et qu'il n'y a rien insufflé qui lui soit propre, et Nicolas Sarkozy dont la mesure qui a le plus marqué les Français fut le trop fameux bouclier fiscal, le contraire du courage politique, convenons-en. Je prends les paris que ces deux-là passeront rapidement aux oubliettes de l'histoire.

Qu'en sera-t-il de François Hollande ? Il est évidemment trop tôt pour le dire, mais alors que jusqu'ici son image de Président de la République était brouillée par des cafouillages ou des renoncements, deux évènements majeurs viennent la modifier en profondeur, et peut-être inscrire François Hollande dans les pages d'histoire.

La décision d'envoyer des forces militaires françaises au Mali, bien sûr, puisque prise de façon soudaine, elle fait de François Hollande un homme à poigne, capable de décider. La manif contre le mariage gay surtout. Pourtant au départ, le mariage homosexuel aurait dû être une simple formalité, soutenue par l'opinion, et s'inscrivant dans la suite logique du PACS 10 ans plus tôt. Las, plutôt que d'inscrire cette loi dans les premières de son mandat, de s'en servir comme d'un moment clé, il a préféré que s'instaure un débat. Surtout, en brouillant les messages, sur la liberté de conscience des élus ou sur la PMA, il a de fait limiter la portée politique de la loi, qui désormais apparaissait comme un boulet dont il fallait se débarrasser.

Heureusement pour François Hollande et son gouvernement, il peut toujours compter sur une des droites les plus bêtes et les plus réactionnaires du monde. Comme elle n'a rien à dire sur les dossiers sociaux, économiques ou internationaux, elle a donc fait du mariage homosexuel son cheval de bataille pour se relancer après des mois de divisions internes. En réussissant sa manifestation, elle a rendu une fière chandelle à François Hollande. Le mariage gay s'inscrit désormais dans la longue histoire des conquêtes républicaines qu'il a fallu aller chercher avec les dents. François Hollande tient sa mesure phare, celle qui se construit dans la difficulté, celle qui pourrait rester dans l'histoire. Et faire de lui un Président. Merci la droite !