Après les drames de Toulouse et Montauban : et si le principal bénéficiaire était Jean-Luc Mélenchon ?

Ca y est, les oracles médiatiques ont tranché pour nous, l'incroyable épisode westerno-politique que nous venons de vivre ne peut donc que bénéficier à Nicolas Sarkozy et à l'extrême-droite. Ben oui quoi, quand la sécurité et la lutte contre le terrorisme reviennent sur le devant de la scène, c'est forcément à eux que cela profite, parce que c'est bien connu, la droite est meilleure que la gauche dans le domaine de la sécurité. Pas sûr que les Français s'en soient rendu compte ces dix dernières années, mais puisque les médias vous le disent, vous êtes donc priés de le croire.

Que Sarkozy en tire des bénéfices, c'est possible dans un premier temps, mais cela risque de ne pas durer, parce qu'à un moment donnée, il faudra bien répondre aux questions sur les zones d'ombre de cette affaire. Quant à l'extrême-droite, la précipitation avec laquelle Mme Le Pen est intervenue, la violence de ses propos alors que la période de concorde nationale n'était pas encore terminée, tout cela est à l'image de sa campagne : nulle et ridicule et devrait au final lui nuire, comme semblent l'indiquer les premiers sondages. 

Pourtant, il me semble qu'il est un personnage que l'on oublie et qui pourrait bien tirer son épingle de cette séquence : Jean-Luc Mélenchon. Là, vous vous dites, ça y est, il a fumé, il nous refait le coup de la mélenchonmania, il commence à devenir lourdingue, et si on se réfère au premier paragraphe et à la prétendue incompétence de la gauche dans le domaine de la sécurité, vous avez raison.

Sauf que lui, Jean-Luc Mélenchon, ne parle pas ou peu de sécurité ! Alors que tous les autres ont démarré au quart de tour et sont partis tête baissée sur le sujet, lui s'acharne à vouloir parler de la crise, du chômage, des problèmes de logement de précarité. Or, s'il est indéniable que les questions sécuritaires ont fait un retour médiatique fracassant, les autres sujets, ceux qui étaient jusque là, et sont toujours la priorité des Français n'ont pas disparus. Et Jean-Luc Mélenchon est le seul à en parler, continuellement, inlassablement. Tôt ou tard, cela portera ses fruits, plutôt rapidement d'ailleurs, si on en juge les premières enquêtes sondagiéres.

Mais il est aussi une seconde raison, plus subtile, plus insidieuse pour laquelle Jean-Luc Mélenchon pourrait profiter de cette séquence. Nous vivons une période ou le rejet du système est profond et partagé dans de nombreuses couches de la population. Les médias, chaînes télévisées en première ligne sont considérées comme faisant partie intégrante du système politique et économique qui est le nôtre, ils en sont même le chaînon essentiel. Or, la médiatisation des assassinats de Montauban et Toulouse, puis la traque du meurtrier ont été  surréaliste, jusquà l'overdose. Mais, qui incarne aujoud'hui chez les politiques le rejet d'une certaine classe médiatique adepte de la pensée unique (je dis bien certaine, parce que fondamentalement, il est viscéralement attaché à la liberté de la presse) ?  Depuis sa pitoyable tentative de dédiabolisation, cela ne peut plus être Marine Le Pen, tant une certaine presse lui a ciré les pompes, ce ne peut donc être que Jean-Luc Mélenchon, dont les prises de position contre certains journalistes sont dans toutes les têtes.

Hier, pour la première fois, le candidat du Front de gauche était donné à 14 %, devant Marine Le Pen et François Bayrou. Dans tous les instituts il a progressé entre 2 et 4 points en une semaine, ce qui est énorme. Il faut y voir les conséquences de l'extraordinaire mobilisation de la Bastille, mais pas seulement, je suis persuadé que ces derniers jours, en se démarquant du reste de la classe politique (avec François Bayrou qui a été courageux sur ce coup), en laissant François Hollande jouer avec Nicolas Sarkozy à celui qui faisait le plus présidentiable, il a marqué des points, réussi à faire valoir sa petite musique.