Médias : en France, le quatrième pouvoir n'existe plus.
La notion de quatrième pouvoir pour parler de la presse vient en partie des Etats-Unis et de l'affaire du Watergate qui avait fait tomber un président de la République. De fait, on considère qu'il n'est pas de vraie démocratie sans presse libre et indépendante constituant de fait un vrai contre pouvoir.
En France, on le sait, le pouvoir politique s'est toujours occupé de très prés de l'information et de la communication. Il n'y a pas si longtemps que cela, le contenu du journal télévisé de 20 Heures était discuté dans le bureau du ministre. Les choses se sont évidemment améliorées depuis avec la multiplication des sources d'information. Pour autant, depuis quelques années, le retour en arrière est enclenché, et s'est même accéléré ses dernières semaines.
En l'espace de quelques années, les principaux médias de ce pays, de droite comme de gauche, sont tombés dans les mains de grandes multinationales, qui ont la double particularité de défendre les mêmes intérêts économiques et d'avoir des dirigeants très proches de l'actuel président de la République. De fait, à plusieurs reprises des bruits ont circulé sur l'intervention du chef de l'Etat dans les rédactions. Depuis 2008, Nicolas Sarkozy a aussi fait main basse sur les télés et radios publiques, puisque selon la loi c'est lui qui nomme directement les PDG de France Télévisions et Radio France.
Le pouvoir a beau crier haut et fort que la presse est libre et qu'en aucun cas il intervient pour empêcher une information de sortir, trois évènements médiatiques récents viennent renforcer ce sentiment que nous sommes revenus à une époque de contrôle total de l'information.
L'affaire Eric Woerth tout d'abord. Certes, elle commence à faire du bruit et à sortir de la confidentialité. Mais il aura fallu du temps. Il est vrai qu'il est plus facile de faire un journal complet ou presque sur les déboires de onze types en culotte courte que de s'intéresser à une histoire qui dans n'importe quelle démocratie anglo-saxonne aurait fait vaciller le pouvoir.
Les difficultés économiques du Monde ensuite. Le journal dont la situation financière est catastrophique (1) a prévu d'ouvrir son capital. Jusqu'ici, il s'agissait d'une rédaction en partie indépendante puisque les journalistes avaient un droit de véto au sein du comité directeur. Avec l'ouverture du capital, se sera fini. Or, il se trouve que d'importantes rumeurs circulent selon lesquelles le chef de l'Etat aurait fait des pressions pour favoriser un des repreneurs potentiels, le groupe Orange, dont l'actuel PDG est un de ses proches (2). Le journal Français de référence sous la botte de l'Elysée, avouons que cela fait un peu désordre.
Enfin, on s'en doutait un peu, mais c'est désormais officiel, Stéphane Guillon n'officiera plus à France Inter à la rentrée. Fini les coups de pied dans la fourmilière, ceux qui veulent rire un peu le matin devront se contenter de l'humour gentillet et bien dans la ligne de RTL ou Europe 1. Ce qui est intéressant, c'est la façon dont cette éviction se produit. Il n'y a ici aucun soupçon de censure. L'Elysée n'a en aucun cas téléphoner ou fait pression. Non, c'est le patron de Radio France, Jean-Luc Hees, et celui de France Inter, Philippe Val, aui assument cette décision. Or, les deux doivent leur nomination au chef de l'Etat, et quelle que soit leur compétence ou leur sincérité, la suspicion entourera toujours chacune de leurs décisions. Qu'on le veuille ou non, la radio publique est bien sous contrôle.
Si on considère qu'il n'y a pas de démocratie sans liberté de la presse, on est en droit de s'inquiéter sur notre démocratie. On pourra toujours objecter qu'internet, les blogs notamment ont su trouver et exploiter un vrai espace de liberté. C'est vrai pour l'instant, même si cela reste limité. Mais surtout, les attaques et les menaces commencent à se faire jour. Les procès se multiplient contre certains sites, et certains élus veulent renforcer les contrôles sur les blogs notamment (fin de l'anonymat).
Le paysage médiatique Français est plutôt sombre. Heureusement, il nous reste une éclaircie, une institution intouchable et qui doit le rester : Le Canard Enchaîné.
(1) Au passage il est intéressant de noter qu'un des principaux dirigeants du Monde, responsable de la situation financière, Alain Minc, a l'écoute de l'Elysée.
(2) Et quand on connaît la situation sociale dans cette entreprise, on peut être inquiet pour l'avenir du journal.
Sur le sujet :
martine faure revient sur le rachat du Monde, de même que le bouffon du fouquets. Sur les autres affaires (Woerth et Guillon), je pense que les articles sur internet font flurir un peu partout, je n'en sélectionne donc pas.
Sur le web :
Un peu partout l'écologie politique s'organise. voie militante nous donne l'exemple de l'Eure.
Parallèle entre équipe de football et équipe gouvernementale ? Certains comme a tort ou a raison franchissent le pas.
Pour jef, les efforts demandés ne sont pas les mêmes pour tout le monde.
Rosa Lobato de Faria est une grande vedette portugaise elle vient de décéder. du bleu dans mes nuages lui rend hommage.