Ségolène Royal, l'épine dans le pied des éléphants du PS
Elle est incroyable Ségolène Royal. Cela fait des mois que tous les caciques du PS, tous les éléphants de retour, n'ont de cesse de tout faire pour l'éliminer. Ils ont tout essayer, les petites phrases, les trahisons (Montebourg), la montée en puissance médiatique de figures pourtant bien peu charismatiques (Aubry, Delanoë), l'isolement politique, rien n'y a fait, elle est toujours là. Mieux (ou pire c'est selon), c'est quand on la croit au fond du trou qu'elle ressurgit du bois.
En cela, son show au Zénith hier soir est un rappel nécessaire aux Hollande, Aubry, Delanoë qui voudraient bien faire leurs tripatouillages de motions tranquillement dans leur coin. Là où Delanoë et Hollande ont péniblement rameuté 500 personnes à Cergy, elle, elle remplit le Zénith. Et le message est clair, peu importe qui sera le prochain secrétaire national du PS, ce dernier devra compter avec elle, car elle a bien l'intention d'être de nouveau candidate à la présidentielle. Etre présidente un jour, c'est son objectif, avec ou contre le PS.
Alors, certes elle peut énerver, Ségolène Royal. Elle est même critiquable sur nombre de ses prises de position. Mais elle a un côté bravache, une sorte de Don Quichotte en jupons qui combat les vieux moulins à vent socialistes, ceux-là mêmes qui ont tant fait de mal à la politique et à la gauche. Alors ce roc immuable, cette faconde mitterandienne revendiquée, ça rassure, ça plaît, même si on n'ose se l'avouer.
Ségolène Royal est iconoclaste, elle s'est forgée en dehors du parti, mais elle est populaire et particulièrement au sein des couches sociales qui ces dernières années ont déserté la gauche, et comme c'est bien la seule dans ce parti, elle gêne, elle exaspère les cadors socialistes. Parce que sa popularité, c'est sa force.
Sa faiblesse aussi. Parce qu'elle incarne, comme Nicolas Sarkozy à droite, la personnalisation de la politique. Comme Mitterand, elle joue avant tout sur son image, mais plus que son maître en politique, elle fait de la politique un spectacle. En retard dans les sondages en 2007, elle fait Charléty, distancée pour la conquête du parti, hop, un Zénith.
Et ce côté spectaculaire, c'est contraire à ce qu'est fondamentalement la gauche. Alors que la droite a toujours eu besoin d'un chef (De Gaulle, Chirac, Sarkozy aujourd'hui), la gauche elle, se targuait de jouer collectif, voulait mettre en avant les idées plutôt que les personnes. Mitterand a commencé à entreprendre ce virage, Ségolène Royal, à l'instar de Besancenot ou de Bayrou, continue à creuser ce sillon.
On peut se réjouir de cette évolution, ou bien la regretter, mais elle correspond à ce que veut la cinquième République ; et elle correspond probablement aussi aux inspirations profondes du peuple Français, toujours en recherche d'un sauveur. Et comme les éléphants socialistes continuent à faire de la politique comme si le monde n'avait pas évolué en 30 ans, alors, forcément, elle gêne.