Des idées pour lutter contre la précarité
Après mon second billet sur le RSA, j'ai été interpellé (gentiment) dans un commentaire sur le fait que je critiquais beaucoup (c'est vrai), sans jamais rien proposer. Il est vrai que chez les politiques de gauche, il y a bien peu d'idées, ou du moins elles sont inaudibles pour l'instant. Mais, à titre personnel j'ai quand même quelques réflexions sur la situation actuelle et sur comment y remédier.
Tout d'abord, l'objectif du RSA est de rendre le travail plus attrayant financièrement. Là, je vois une solution beaucoup plus simple, elle serait d'augmenter les salaires, et de payer le travail à sa vraie valeur. Quand on voit que les caissières à Carrefour touchent à peine 1000 euros net par mois, qu'elles sont obligées parfois de se mettre en grève pour de simples augmentations qui ne rattrapent pas l'inflation, alors que dans le même temps leur société annonce des bénéfices colossaux, il y a problème. Et une des façons de mieux rémunérer le personnel serait de le faire profiter de ces bénéfices. Pourquoi il ne devrait y avoir que les actionnaires pour toucher le fruit du travail des autres ?
Alors évidemment, augmenter les salaires, cela revient aussi à augmenter les charges. Ce qui à mon avis, et contrairement à ce que l'on nous rabache à longueur de temps, n'est pas un problème pour les grosses entreprises (du moins celles qui font des bénéfices). En outre, je rappellerais que les salaires dans les pays d'Europe du nord sont plus élevés qu'en France avec des charges équivalentes. Par contre, il y a le problème des entreprises en difficultés, et c'est là que doit intervenir l'état, en ciblant mieux ses aides qu'il ne le fait. N'oublions pas en effet, que la plupart des subventions de l'Etat vont d'abord aux grosses entreprises. Les services publics devraient je le pense assujettir toute aide à des résultats concrets en matière d'embauche ou de maintien de l'emploi. Cela devrait se matérialiser par des obligations de remboursement pour toute société ne jouant pas le jeu, ou profitant des deniers de l'Etat pour engranger avant délocalisation, par exemple.
Voilà pour les salaires et les charges sociales, et je remarque toutefois qu'à chaque fois que l'on augmente les revenus des couches les moins aisées, cela se retrouve immédiatement dans la consommation et bénéficie à toute l'économie, et ne va finalement que très peu dans l'épargne.
Sur la précarité maintenant, qui beaucoup plus que le chômage, est le vrai problème de notre société dite moderne. Il me semble urgent de revenir sur deux suppressions, l'une par la droite, l'autre par la gauche, et qui malheureusement ne font même plus l'esquisse d'un début de débat dans ce pays.
En premier lieu, il faut rétablir l'autorisation administrative de licenciement supprimée en 1986 par le gouvernement Chirac. L'argument donné à l'époque était que pour pouvoir embaucher les entreprises devaient pouvoir licencier plus facilement. On a vu les résultats, le chômage est passé de 2.5 millions à l'époque à plus de 3 millions 5 ans plus tard, et dans le même temps, le travail précaire explosait. Rétablir cette autorisation administrative ferait peut-être remonter le taux de chômage (le vrai, pas le trafiqué), mais dans le même temps, elle permettrait à de nombreuses personnes embauchées en temps partiel ou en CDD de soritr de la précarité.
Et donc, logiquement, en second lieu, il faut rétablir l'impossibilité pour les entreprises d'avoir plus de 10 % de personnes sur des contrats intèrimaires, comme c'était le cas avant que le gouvernement Jospin ne permette d'aller jusqu'à 50 %. L'emploi doit cesser d'être la variable d'ajustement systèmatique. Sans comper que des salariés à temps plei, et en CDI s'investissent beaucoup plus, sont plus motivés, et donc à terme plus rentables.
Voilà, il me semble que ce sont pourtant des idées simples, frappées au coin du bon sens (en tout cas de "mon" bon sens). Je remarque simplement que depuis 30 ans, on nous serine que les charges sont trop lourdes, qu'il faut aider les entreprises, et donc que depuis 30 ans, toutes les politiques vont peu ou prou dans ce sens, et que la situation des travailleurs continue inexorablement de se dégrader. Il serait donc peut-être enfin temps de se demander si on ne fait pas fausse route, et d'essayer de voir si la solution économique ne passe pas en premier lieu par une amélioration des conditions de vie des couches les plus fragiles.